18. MODÈLE DE MONÉTISATION

Traite de différents modèles de monétisation d’une plateforme jeunesse.

1.1 La structure des principaux modèles de monétisation

Il existe un flou autour des mots utilisés pour décrire les différents modèles de monétisation, les éléments structurels distinctifs étant parfois très subtils. Voici les structures classiques de monétisation :

  • Gratuit avec une offre de version bonifiée ou « Freemium » : La plateforme offre une version gratuite et, en parallèle, des contenus « premium » payants (ex. accès à des zones exclusives). Le terme « freemium » (free + premium) est souvent utilisé pour décrire ce modèle.
  • Gratuit avec des achats individuels ou « Free to Play » : La plateforme offre une version gratuite et propose des achats individuels pour obtenir des avantages qui optimisent l’expérience de l’utilisateur (ex. essais supplémentaires, sauter des niveaux, etc.). Dans ce modèle, tout le monde a accès à la même plateforme, mais la progression des utilisateurs qui ne payent pas sera généralement plus lente. Ce modèle est souvent appelé « Free to play ».
  • Payantou « Premium » : Un modèle qui n’offre pas de version gratuite. L’usager doit débourser de l’argent pour accéder à la plateforme. Le produit peut s’acheter en un frais unique ou par abonnement, avec des frais périodiques récurrents.

1.2 Les achats intégrés (in-app)

L’achat intégré est un processus de paiement simplifié liant le compte utilisateur à une forme de crédit (carte de crédit ou prépayée) ce qui permet à l’usager d’acquérir des biens virtuels sans avoir à quitter la plateforme. Ces microtransactions sont un élément essentiel des modèles gratuits avec une offre payante (version bonifiée et achats individuels). Par exemple, chez Apple, pour faire un achat dans une application téléchargée à partir de l’App Store, l’usager entre son Identifiant Apple, la transaction est portée à la carte de crédit liée à son compte iTunes et il obtient son bien virtuel instantanément.

1.3 Les achats accidentels 

Si un adulte comprend que les frais d’un achat intégré d’une application sont portés à sa carte de crédit et payables en argent réel, ce principe est beaucoup moins clair pour un enfant. Un jeune confronté au choix d’attendre 30 minutes pour avoir une vie ou d’acheter des « diamants » qui lui permettront de se procurer 10 vies sans délai risque fort d’être tenté par la deuxième option. L’enfant n’a pas nécessairement la maturité et l’expérience de consommateur nécessaires pour évaluer la valeur de l’achat, voire pour comprendre que de l’argent réel est impliqué.

Nombreux sont les cas d’enfants ayant dépensé plusieurs centaines de dollars en quelques minutes par le biais d’achats intégrés. Bien qu’une part de la responsabilité incombe aux pratiques de facturation des plateformes de distributionl’application est tenue de rembourser les « achats non autorisés » à la demande du détenteur de la carte de carte de crédit, c’est-à-dire du parent.

1.4 La dynamique enfant/utilisateur et parent/payeur

Une plateforme jeunesse est à la fois destinée à l’enfant et à ses parents : chaque partie n’a pas les mêmes attentes et objectifs, mais les deux détiennent une forme de pouvoir décisionnel sur la décision d’achat. Cette mécanique engendre des défis importants au niveau de la monétisation, spécialement dans le numérique où c’est le parent qui détient la solution de paiement dans la grande majorité des cas. Si l’enfant veut jouer à un service payant, à moins de détenir une carte prépayée de style iTunes, il doit demander à un parent pour que celui-ci procède au paiement par carte de crédit.

Vous avez la responsabilité de prendre des mesures raisonnables pour vous assurer que le parent/détenteur de la carte de crédit donne son consentement exprès et éclairé pour chaque achat.

1.5 Service après-vente et soutien technique

Les attentes des utilisateurs relatives au service après-vente d’un service payant, même si le coût d’achat est faible, sont généralement plus élevées que dans un service « gratuit » avec une offre payante. Que ce soit pour des demandes relatives à la facturation, le renouvellement d’un abonnement ou encore des difficultés d’installation, le support fourni aux usagers est un élément important de la qualité d’un produit. En tout temps, l’usager doit avoir accès facilement aux coordonnées du service à la clientèle.

Les lois sur la protection du consommateur et sur le commerce électronique s’appliquent aux modèles de monétisation. La notion de paiement en ligne implique la collecte de données personnelles. À cet effet, veuillez consulter les fiches Collecte de données personnelles et Module transactionnel.

CANADA

  1. La Loi sur la concurrence

Loi fédérale encadrant les pratiques commerciales sur toutes les plateformes médiatiques. Elle contient une disposition interdisant les pratiques commerciales trompeuses. Les entreprises qui font affaires à partir du Canada sont tenues de se conformer. La loi n’a pas de disposition spéciale pour les enfants.

  1. Loi sur la protection du consommateur

Loi relevant de chaque province qui encadre les pratiques commerciales, incluant le commerce électronique.

Pour plus de détails, veuillez consulter :

***QUÉBEC***

Loi sur la protection du consommateur

La Loi sur la protection du consommateur interdit la publicité à but commercial destinée aux enfants âgés de moins de 13 ans sur tous supports médiatiques, sauf quelques exceptions prescrites par règlement. L’interdiction s’applique aux messages qui s’adressent aux enfants québécois, et ce, même pour les compagnies situées à l’extérieur de la province de Québec.

Pour plus d’informations, Office de la protection du consommateur, Publicité destinée aux enfants de moins de 13 ans.

ÉTATS-UNIS

Federal Trade Commission Act

Loi fédérale qui interdit les pratiques commerciales trompeuses ou déloyales, incluant le commerce électronique. Cette loi indique que pour être autorisée, toute transaction doit être basée sur le consentement éclairé du détenteur de la carte de crédit.

Pour plus de détails, consultez le site web de la Federal Trade Commission. Advertising and Marketing on the Internet : Rules of the Road

UNION EUROPÉENNE & FRANCE

Directive relative aux droits des consommateurs

Cette Directive couvre la vente en ligne et contient des dispositions spécifiques qui imposent des obligations aux producteurs de biens numériques. Le producteur doit fournir des informations incluant :

  • Description du produit : configurations requises et restrictions techniques, détails sur les fonctionnalités de base, limitations connues (ex. Non compatible sur PC), le prix (incluant les frais futurs pour un abonnement), informations sur les achats intégrés;
  • Conditions générales de vente : délai de rétractation, les conditions de remboursement et la livraison du produit;
  • Informations sur votre compagnie : nom et l’adresse géographique, coordonnées (courriel et téléphone).

Ces informations doivent être disponibles sur la page de description du produit, communiquées par courriel lors d’un achat et facilement accessibles en tout temps sur la plateforme. De plus, la Directive accorde au consommateur un droit de rétractation de l’entente contractuelle, c’est-à-dire un droit de remboursement, dans les 14 jours suivant la transaction. Pour éviter les demandes de remboursement excessives, le producteur peut demander au consommateur de renoncer à son droit de rétractation en cochant une case « Commander avec obligation de paiement » qui fera office de consentement explicite.

Les états membres de l’Union européenne, en lien avec la Directive aux droits des consommateurs, ont élaboré une Position commune sur les jeux gratuits avec une offre payante qui prévoit que :

  • Les jeux annoncés comme « gratuits » ne doivent pas induire le consommateur en erreur quant aux coûts réels impliqués;
  • Les jeux ne doivent pas encourager directement les enfants à acheter des applications intégrées dans un jeu ou persuader un adulte d’en acheter pour eux;
  • Les consommateurs doivent être dûment informés des modalités de paiement et les achats ne doivent pas être débités à travers de paramètres par défaut sans le consentement exprès des consommateurs;
  • Les sites de vente doivent indiquer une adresse de courriel pour que les consommateurs puissent les contacter s’ils veulent poser une question ou déposer une plainte.

Directive relatives aux pratiques commerciales déloyales

Cette directive interdit les pratiques trompeuses et agressives et les pratiques malhonnêtes des entreprises vis-à-vis des consommateurs. Elle identifie le fait de « décrire un produit comme étant « gratuit » si le consommateur doit payer quoi que ce soit d’autre que les coûts inévitables » comme une pratique trompeuse. La Directive présente également une série de pratiques commerciales à proscrire dont une disposition sur les enfants : « Dans une publicité, inciter directement les enfants à acheter ou à persuader leurs parents ou d’autres adultes de leur acheter le produit faisant l’objet de la publicité. »

Directive sur le commerce électronique

Cette directive couvre la responsabilité des opérateurs établis dans l’UE pour les services en ligne, les transactions électroniques et autres activités en ligne, les services de divertissement (vidéo à la demande), le marketing et la publicité directe et les services d’accès à l’internet.

Elle souligne à quelques reprises l’importance de « protéger les mineurs ». Par exemple, en lien avec les pratiques déloyales, la Directive indique qu’un magasin d’applications mobiles doit retirer de sa plateforme une application qui incite directement l’enfant à faire des achats intégrés. Elle indique également que la compagnie doit fournir les informations essentielles sur le produit au consommateur et que tout achat doit être fait avec le consentement explicite du consommateur.

Pour plus d’informations :

AUSTRALIE

Australian Consumer Law

Loi fédérale qui interdit les pratiques trompeuses dans le contexte commercial. L’organisme chargé de la faire respecter, l’Australian Competition and Consumer Commission, a émis des recommandations pour les applications mobiles avec des achats intégrés, entre autres : les magasins d’applications mobiles doivent faire des efforts pour protéger les parents et les enfants en développant un système de classification en fonction de l’âge qui considère la présence d’achats intégrés et l’incitation soutenue à faire des achats.

Informations complémentaires:

Australian Competition and Consumer Commission

Australian Communications Consumer Action Network, App purchases by Australian consumers

Les plateformes de distribution doivent s’assurer d’avoir le consentement exprès et informé du parent avant de facturer des achats faits dans une application, c’est-à-dire :

  • Fonctionnalité permettant de bloquer les achats intégrés;
  • Indiquer dans la description de l’application la présence d’achats intégrés;
  • L’entrée du mot de passe est obligatoire pour chaque achat intégré.

Amazon, Apple et Google indiquent que les achats intégrés sont destinés à la vente de biens virtuels uniquement : vous ne pouvez pas les utiliser pour faire la vente de produits ou de services destinés à être livrés ou utilisés à l’extérieur de l’application.

App Store d’Apple

  • Les applications dans la « Kids Category » doivent obtenir le consentement parental ou utiliser une barrière parentale avant de permettre à l’usager de faire un achat;
  • L’achat intégré est le seul système permis pour faire la vente de biens virtuels dans une application : les mécanismes externes d’achat (lien « Acheter ») ne sont pas acceptés;
  • Le renouvellement automatique d’un abonnement est accepté uniquement pour les applications de périodiques (ex. journaux, magazines), « business » (ex. service de stockage en nuage) et les contenus média (vidéo et audio).

Informations complémentaires :

AUTORÉGLEMENTATION

Code canadien de pratiques pour la protection des consommateurs dans le commerce électroniqueÉtablit un cadre de bonnes pratiques commerciales pour les entreprises qui exercent des activités commerciales en ligne avec des consommateurs à travers huit (8) grands principes qui indiquent entre autres que le commerçant :

  • Ne peut exiger du consommateur le paiement de quelque montant pour une transaction à laquelle il n’a pas consenti;
  • Doit prendre toutes les mesures raisonnables pour empêcher la réalisation d’une transaction financière avec un enfant.

Pour consulter le code

Code de déontologie et normes des pratiques de l’Association canadienne du marketing

Le code a pour but de déterminer les pratiques et les principes éthiques essentiels à la réalisation de communications marketing au Canada. Il s’applique à toutes les organisations membres de l’Association canadienne du marketing. Il comprend une section destinée aux enfants qui indique aux membres de ne pas :

  • Sciemment accepter une commande d’un enfant sans le consentement explicite d’un parent ou faire
  • Faire pression sur l’enfant pour qu’il demande avec insistance à ses parents d’acheter un produit ou un service.

Pour tous les détails, consultez le Code.

Dans les modèles gratuits avec une offre payante, soyez toujours prudent avec la façon de promouvoir les achats. Vous ne devez pas inciter l’enfant à vouloir acheter un bien virtuel ou un abonnement, mais plutôt donner de l’information claire et précise de manière la plus objective possible. Par exemple, quand l’enfant épuise sa monnaie virtuelle, plutôt que : « Tu n’as plus de diamants. Achète des diamants MAINTENANT! » avec un lien cliquable menant vers un achat, optez pour un ton informatif : « Tu n’as plus de diamant. Des diamants sont en vente dans la boutique contre du vrai argent ou tu peux en ramasser en complétant des défis. ». Mais dans tous les cas, c’est au parent qu’il incombe de compléter et/ou autoriser la transaction : assurez vous de mettre en place les dispositions nécessaires (telles que décrites ci-dessous) pour que ce soit le cas.

  • Implantez les achats intégrés en tenant compte de votre public :
    • Évitez les mécaniques de jeu qui demandent à l’enfant de solliciter l’aide d’amis sur des réseaux sociaux, par exemple « Demande des vies à tes amis Facebook! »;
    • Attention aux formulations qui exploitent l’inexpérience des enfants : « Ton lapin meure de faim! Procure-toi vite des carottes au magasin pour le nourrir. » ou encore « Achète vite ce nouveau modèle de voiture, ça aidera ta popularité! ».
  • Expliquez en détail tous les coûts associés à votre plateforme avant que l’usager télécharge, s’inscrive ou fasse un paiement :
    • Le coût initial lié à l’inscription/à l’abonnement/au téléchargement ou à l’achat;
    • Les coûts subséquents et inévitables pour continuer d’utiliser la plateforme (ex. un frais d’abonnement de 2,99$/mois);
    • Les coûts supplémentaires optionnels, c’est-à-dire les achats intégrés.
  • Intégrez des outils de contrôle parental pour prévenir des achats sans le consentement explicite du parent : placez les achats intégrés derrière une barrière parentale adaptée à l’âge du public (c’est-à-dire quelque chose que l’enfant ne peut pas faire, comme une équation algébrique ou toucher aux quatre coins d’une tablette numérique en même temps), permettez de désactiver les achats intégrés ou encore placez-les uniquement dans une section réservée aux parents;
  • Assurez vous de communiquer le maximum de précisions relatives aux transactions proposées :
  • Achats intégrés :
    • Pourquoi sont-ils offerts?
    • Quelle est la gamme de prix?
    • Est-ce un frais récurrent?
    • Comment se présentent-ils dans le produit?
    • Quelles sont les interventions requises pour permettre/empêcher ce type de transaction?
    • Quels sont les systèmes de prévention?
    • Quelle est la politique de remboursement en cas d’achats accidentels (interne, 1.3)?
  • Produit par abonnement :
    • À quelle fréquence sont ajoutés de nouveaux contenus?
    • À quel moment le frais d’abonnement est-il facturé?
    • Combien de temps les contenus sont-ils disponibles?
    • Le renouvellement est-il automatique?
    • Quelles sont les procédures pour interrompre un abonnement?
    • Est-ce que les contenus seront disponibles après l’expiration de l’abonnement?
  • Fournissez par ailleurs toutes informations importantes en fonction des caractéristiques propres à votre plateforme pour prendre une décision d’achat éclairée :
  • Assistez le parent dans la gestion du paramétrage des contrôles parentaux, par exemple, dans une section réservée aux parents, expliquez la procédure pour modifier les paramètres de sécurité sur l’appareil;
  • Les coordonnées pour joindre le service à la clientèle doivent être mises à jour au besoin et facilement accessibles en tout temps. Il est d’ailleurs préférable de donner plus qu’une option pour joindre votre service à la clientèle (ex. par téléphone et courriel).